Après le télétravail, la menace d’une « télémigration »
Adopté par une multitude d’entreprises dans le monde pendant le confinement, le télétravail a largement fait ses preuves ces derniers temps. On estime que la délocalisation des métiers de bureau, qualifiée de « télémigration » par l’économiste Richard Badwin, devrait se démocratiser au cours des prochaines années.
Essor du télétravail
Le télétravail a gagné du terrain et s’est généralisé lors de la période de la crise sanitaire. D’après une étude menée par Tony Blair Institute for Global Change, l’essor de ce mode de travail est susceptible d’engendrer un mouvement massif de délocalisation qui pourrait toucher les emplois qualifiés. En effet, les sociétés ayant opté pour le travail à distance ont obtenu une confirmation des possibilités offertes par cette solution dans la réalisation de certaines missions. Ce qui fait que de nombreuses entreprises soucieuses de réduire leur coût sont aujourd’hui tentées par l’idée de délocaliser des métiers qualifiés. Selon le Tony Blair Institute for Global Change, les effets de ce phénomène pourraient être similaires à la perte d’emplois liée à la baisse du secteur manufacturier en 1970. En Angleterre, près de 1 salarié sur 5 exerce un emploi dans les activités tertiaires qui est susceptible d’être délocalisé. Aux États-Unis, 40 % des emplois nécessitant un diplôme seraient délocalisables d’après les économistes Alan Krueger et Alan Blinder.
Délocalisation des métiers qualifiés
La télémigration est un concept qui a été développé par Richard Baldwin bien avant la période du Covid 19. Ce terme est utilisé pour des individus établis dans un pays et qui travaillent à distance pour une entreprise localisée dans un autre pays.
Si les effets de la mondialisation ont touché jusque-là les personnes qui travaillent dans le secteur de l’industrie et du textile, désormais les travailleurs qualifiés ne sont pas à l’abri. En effet, la délocalisation via le travail à distance pourrait toucher les emplois qualifiés. De nombreux télétravailleurs compétents issus des pays du sud sont aujourd’hui en mesure de rivaliser avec les profils qualifiés issus des pays développés. En ce qui concerne cette nouvelle forme de délocalisation, il s’agit des postes qualifiés dans le secteur des services.
L’économiste Richard Baldwin explique que la délocalisation massive des emplois qualifiés est facilitée par le développement des nouvelles technologies de télécommunication. Nombreuses sont les entreprises qui ont mis en place des outils de collaboration en ligne pour améliorer leur communication et simplifier les échanges. Ces applications collaboratives couplées à la vitesse de transmission du réseau 5 G peuvent contribuer à accélérer le phénomène.
Une nouvelle « opportunité » pour les entreprises ?
La délocalisation des métiers qualifiés peut présenter certains risques, mais est aussi une source d’opportunité permettant aux entreprises européennes de faire face à la pénurie de main-d’œuvre. En effet, la télémigration constitue aussi une solution qui permet d’intégrer plus facilement des travailleurs qualifiés étrangers sur le marché du travail. D’autant plus que recourir à des télétravailleurs indépendants provenant des pays émergents est plus rentable que de faire venir des employés internationaux, en particulier pour les petites entreprises.
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